REVUE DE PRESSE ESPAGNOLE
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Chaque semaine (ou presque), Mathieu
de Taillac, journaliste pour le célèbre journal espagnol
El País, livre en exclusivité sur EnEspagne.com
sa chronique de l'actualité espagnole. |
• 03.07.2006 -
Les réactions de la presse espagnole après l'annonce
officielle de l'ouverture du dialogue avec l'organisation
séparatiste basque espagnole le jeudi 29 juin 2006.
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Mathieu de Taillac - Madrid
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"ETA : Le dialogue
sans l'unité"
Le président du Gouvernement espagnol, José Luis Rodríguez
Zapatero, a annoncé jeudi matin l’ouverture d’un dialogue
avec le groupe terroriste ETA. Cette annonce faite lors d'une conférence
de presse dans un couloir du Parlement est l’une des étapes
de ce qu’on appelle en Espagne le processus de paix, commencé le
22 mars dernier avec l’annonce d’un « cessez-le-feu
permanent » de l’ETA, et qui doit aboutir à la disparition
du mouvement armé.
Le Partido Popular (PP, principal parti de l’opposition) a attaqué durement
la décision de Zapatero, et la presse conservatrice a aussi formulé des
objections. L’ETA, qui a causé plus de 800 morts depuis son
premier attentat mortel en 1968, réclame l’indépendance
d’un Pays basque entendu au sens large, qui comprend la région
autonome Euskadi, sa voisine la Navarre, et le pays basque français
ou Iparralde, qui est une partie du département des Pyrénées-Atlantiques.
Il s’agit de la troisième fois qu’un gouvernement espagnol
entame des conversations avec l’ETA, après les échecs du
gouvernement socialiste de Felipe González en 1988, et du gouvernement
conservateur de José María Aznar (Partido Popular, PP) en 1999. À chaque
occasion, l’équipe au pouvoir avait reçu l’aval de
l’ensemble des partis. Pas cette fois.
El Mundo, qui depuis l’arrivée de Zapatero au pouvoir en 2004 est
l’un des plus féroces critiques des socialistes, parle de « concession
faite à la bande » de la part d’un gouvernement qui « joue
avec le feu ». Son principal reproche porte sur les déclarations
de Zapatero sur « les décisions que les basques adopteront librement ».
La droite y voit une reconnaissance implicite du droit à l’autodétermination
(un référendum sur l’indépendance), exigé par
l’ETA.
Le quotidien conservateur ABC y voit aussi « un aspect politique du dialogue
avec l’ETA, souhaité par les terroristes ». La phrase entière
du président était : « Le gouvernement respectera les décisions
des citoyens basques qui seront prises librement, dans le respect des normes
et des procédés légaux, des méthodes démocratiques,
des droits et des libertés des citoyens et en l’absence totale de
tout type de violence et de contrainte ». Zapatero a affirmé a plusieurs
reprises que l’autodétermination n’était pas un concept
valide en Espagne, et que la Constitution en vigueur était le plafond
des revendications nationalistes.
Du côté des soutiens, on trouve le madrilène El País
et le barcelonais El Periódico de Catalunya, tous deux proches du Parti
Socialiste Ouvrier Espagnol (PSOE) de Zapatero. La seule chose qu’El País
trouve à redire, c’est que l’annonce de Zapatero n’ait
pas été faite devant les députés. Quant à El
Periódico, il opte pour une première page façon fin de guerre
mondiale, et titre en énorme « La paix est le chemin », en
empruntant sa sagesse à Gandhi.
Du côté des premiers intéressés, le modéré El
Correo, au pays basque, considère que le gouvernement « respecte
son devoir en explorant les possibilités réelles qu’offre
le cessez le feu de l’ETA pour en finir avec la plaie du terrorisme ».
Prochaine étape annoncée : la consultation, en septembre prochain,
de l’ensemble des groupes parlementaires par le ministre de l’Intérieur,
Alfredo Pérez Rubalcaba, pour les informer de l’évolution
du processus de paix.
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